Une terrible beauté / 2 les nanotechnologies

Deuxième opus de ma recherche, j'ai longtemps hésité entre ce texte et les papillons (finalement choisi pour concourir). Ai-je eu tord ?

Une terrible beauté est née

12/11
Une nuée de bécasses encombre l’accueil du studio. Font chier ces gamines filiformes à seins durs. Sont même pas connes en plus. Monde cruel.

01/12
Sommes douze - rédactrices ou apôtres ? - à tester le nouvel anti-âge Vichy.
De la Bombe ! Mes pattes d’oie fondent, mon teint s’éclate ! Les bécasses,
je les croise en souriant, ne me froissent plus ni l’humeur ni le visage.

02/12
Ai corrigé dix fois mon papier. Suis tellement enthousiaste qu’il semble rédigé par une hystérique. Métamorphose parfaite : l’ovale de mes jeunes années,
plus de cernes sous les yeux, taches brunes et rougeurs envolées.
Mon visage s’anime, souple, déridé. Ma peau saine fait des envieuses.
J’ai une pêche d’enfer, me sens belle.

06/13
Les rues fourmillent de jolies femmes. Par contraste, celles qui n’ont toujours pas
succombé semblent grises. Je trouve choquant d’imposer au monde
un tel délabrement. Manque de respect, d’amour envers soi et les autres.
Au bureau, ouf ! Toutes sont addicts. Les plus faibles pèchent encore côté kilos mais cela ne saurait perdurer. Les labos bossent sur les body-crêmes.
Nous serons toutes des nymphettes à seins durs. Patience...
Bon... les BoBio font chier. Ils militent contre les nano-tec. Menaces à long terme, gnagnagna. Ouai....

06/16
Panique ! Des cas de «désorganisation cellulaires» apparaissent.
Des nano-particules mutent, poursuivent la création de matière sans fin.
Résultat : plus de rides mais des bosses.
Le spectre d’Elephant Man plane sur la ville.

06/99
J’ai cent trente ans. Je vais bien. Tout le monde va bien, si bien que nous
pullulons. Un désastre ? Non. Une autre terre s’élabore.
Son atmosphère sera viable dans trois ans. Les nanos ont réponse à tout
depuis bien longtemps. Ne restent que les détails de nos vies à choisir.
Suis-je heureuse dans ce monde sain, sans faille ? Non. Je suis lasse.
Lasse de perfection insipide, d’opulence vaine, de jouissance stérile.
Je tourne à vide sur cette planète idéale, belle, terriblement belle,
dépourvue de mal et d’êtres pensants.