Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
mots en ligne
30 novembre 2012

J'aime pas l'école

J’aime pas l’école

J’veux pas aller à l’école. Y fait froid de neige. J’ai envie de dormir. J’avance de travers, le bras loin devant tiré par maman.

Maîtresse Laurence est partie. Elle voulait plus aller à l’école.
La nouvelle arrive ce matin.

Porte fermée. Na ! Maman sonne. Pauline ouvre et dispute maman. Bienfait !

J’entre le dernier en classe. M’en fout. Je regarde pas la nouvelle.
J’accroche ma doudoune, mon écharpe gratte kiki, mon bonnet au porte-manteaux. Ça tient pas. Sabine m’aide et gnagnana t’es maladroit... Je m’assois.

Maéva colorie le père Noël. Ça déborde. Elle est nulle.
La nouvelle me donne une feuille avec un sapin vide.
En plus, elle est moche comme maîtresse !
J’fais des boules rouges. Pis une guirlande. Une seule, parce qu’il faut ranger.

Elle dit tout le monde ; on lève le doigt. Y manque personne.

Elle s’appelle Sabine aussi. C’est pas pratique. Alors on dira Maîtresse Sabine pour elle, et que Sabine pour l’autre. Elle a l’air un peu gentille quand même.

On entoure des «m». Je connais. Le «m», il a plus de ponts que le «n». C’est facile. J’ai bonhomme vert. Pas Maéva.

Maîtresse Sabine gronde pas. Ça repose les oreilles et ça tord moins le ventre. Avant, quand j’étais moyen chez Estelle, j’avais le ventre tordu tous les jours. Je faisais attention pour pas me faire crier. Mais même sur les autres, j’aimais pas. Ça fait peur.

Si on va pas assez vite dans le couloir, maîtresse Estelle elle nous pousse ou nous tire un peu fort. Et quand on était pas gentils du tout alors là c’est pas possible vous êtes insupportables aujourd’hui, elle ouvrait pas la porte aux parents. C’était l’heure des papas-mamans. Mais non, ils restent dans la cour. Nous, on attend dans la classe sans rien faire. Personne rigole. On entend les mouches péter. Estelle attend que tout le monde est là, elle ouvre la classe et rouspète les parents c’est pas possible un tel manque de respect et vous avez pas rapporté tous les papiers. Elle fâche pas les parents, elle parle pointu, méchante qui se retient. Sur nous, elle retient pas, elle crie tout rouge avec des portillons. Les portillons, c’est les petites gouttes d’eau qui sautent de la bouche quand on parle. Yassine, lui, il crache des gros mollards. Mais pas souvent, il fait pas trop l’andouille. Moi non plus. Ça empêche pas. On se fait gronder aussi. Alors on a décidé. Quand on sera grands comme des papas, nous aussi on criera Estelle avec des portillons. En attendant on joue doucement.

Maintenant on joue un peu plus fort à cause de maîtresse Sabine. Elle veut bien qu’on court vite à la récrée et qu’on appelle un copain pas tout bas qu’il entend pas.
Si Romain bagarre, elle lui parle doux. Alors Romain, il enlève sa colère et attend sur le banc des punis qu’il peut jouer encore.

Elle parle toujours doux maîtresse Sabine. Même lorsqu’Estelle tempête.
Estelle est copine avec Pauline la directrice, et elles embêtent tout le monde. Même les dames cantine, même les petites maîtresses pas chef ATSEM, même maîtresse Sabine gentille. Elles embêtent en disant non c’est pas comme ça, ou alors je t’avais demandé de surveiller ma classe et c’est même pas vrai, ou alors elles ferment tous les tapis de motricité à clef et nous on va dehors qu’il fait froid. Après y manquent deux ballons qu’on les a pris. Mais personne peut voler un ballon dans sa poche, c’est trop gros !
Et pis on a toujours peur de faire une bêtise, même si on fait rien. Les grandes dames aussi.

Aujourd’hui j’ai vu maîtresse Sabine, elle pleure à la récrée. C’est peut-être ses yeux. La semaine dernière elle les a opéré. Elle était pas là. On avait maître Jean. Les vilaines l’enquiquinent pas maître Jean. Il vient boucher les trous des maîtresses malades. Il a pas bouché le trou de la réunion des parents pour parler de la kermesse parce que c’est pas lui qui sera là à la fin de l’année. Alors la classe des grands, y’avait personne pour expliquer les fêtes qu’on fera quand on sera contents de finir l’école. Les parents, y sont venus pour rien à sortir du travail plus tôt pour voir la maîtresse absente et vous vous rendez compte des désagréables ment. Maîtresse Sabine dit qu’elle savait pas la réunion. Moi je la crois. Et pis toutes les dames de l’école savaient : elle pouvait pas être là, elle opérait ses yeux d’abord !

Des fois, maîtresse Laurence pleurait aussi. Après noël, elle est plus venue. Elle est malade qui dure longtemps. C’est pour ça, ils l’ont changé. Nous, on est toujours là. On peut pas être malade qui dure longtemps. Maman veut pas.
Sauf Matéo. Lui, il est pas venu chez les grands. Quand on était moyens, Estelle criait Matéo tous les jours tu peux pas rester en place cinq minutes, arrêtes de bouger, calmes toi tu m’énerves. Matéo, c’est vrai, il savait pas rien faire. Il zigotait tout le temps sur sa chaise c’est insupportable. Moi, ça gênait pas mais Estelle, oui. A la fin, il était assis tout seul à côté de la porte pour que les parents voient bien comme t’es méchant et le cadeau de la fête des pères vous n’aurez rien car il est incapable de se concentrer cet enfant. Son papa a rentré la tête dans le cou comme les poules de mémé quand elles dorment. Matéo est sorti en se grattant les fesses. Il faisait toujours ça. Il a été malade qui dure longtemps. Je le vois plus jamais.

J’ai peur que maîtresse Sabine, elle devienne malade comme Matéo ou maîtresse Laurence et qu’on l’a plus. Des fois, je lui donne la main pour lui dire qu’elle part pas.
Sinon, je joue avec Bastien et Maéva la plus bête. On lui dit t’es un cheval. Elle court. Le premier qui l’attrape a gagné. On lui dit t’es une princesse. Elle fait la belle. On se bat pour de faux avec Bastien pour savoir c’est qui qui l’embrasse sur la bouche. Faut faire attention à cause de maîtresse Sabine, elle veut pas. On dit t’es un moustique. Le premier qui lui claque les deux joues par derrière a écrasé le moustique qui pique.

Ce midi la récrée dure longtemps. Les dames cantine parlent tout bas qu’on entend pas mais on entend un peu quand même qu’on vocation à l’inspection qu’a des mites. Je sais pas quoi mais c’est grave. Personne nous surveille pour de vrai. Bastien fait l’andouille avec Maéva.

Toutes les maîtresses reviennent. Les dames cantines font semblant de rien. On va en classe. Maîtresse Sabine parle tout bas. On entend presque rien. Des fois, les mots se cassent. C’est bizarre. Finalement on regarde un dessin animé.

A la récrée, je laisse Bastien montrer sa bistouquette à Maéva. Moi, je donne la main à maîtresse Sabine. Elle dit aux dames cantine que personne va muter comme si de rien n’était qu’aucune sanction ne sera prise avec bonne volonté chacun du sien les choses s’arrangent.
Elle voit même pas que je lui tiens la main. Comme si nous, les petits, on existait pas. Bastien en profite pour sortir sa bistouquette. Il fait semblant de faire pipi sur l’arbre Maéva qu’est tellement bête elle se laisse faire.
Directrice Pauline arrive pour la récrée des petits. Elle voit tout de suite Bastien le chien et l’arbre Maéva. ça lui plait pas du tout incompétence mise en danger rapport à l’inspection qu’à des mites.
On rentre en classe. Pas la maîtresse. Bastien fait moins le malin. On regarde encore la télé. C’est pas le même dessin animé. Et pis c’est l’heure des parents.

Maman me tire par la main. J’avance de travers le regard en arrière. Je lui dis rien.
Oh ! J’ai oublié ma gourde. Maman soupire. On fait demi tour. Je cours, elle attend. La porte est fermée. Je fais le tour par les wc. Dans la classe je vois ma gourde toute seule sur la table à boire. Et la maîtresse debout sur son bureau accrochée par le cou au plafond. Ça va la rendre malade ! J’ai pas envie alors je grimpe sur sa table, je m’assois à côté de ses pieds et fais un câlin à ses jambes. Elle retire son collier du plafond. On reste assis tous les deux. Et pis on sort, main dans la main.

J’aime vraiment pas l’école.

Publicité
Publicité
Commentaires
Publicité