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9 mars 2012

Le cadeau d'Ibrahim / Chapitre 20

Chapitre 20

Maudites bonnes femmes !
    - Camille !
    - Ne hurle pas Marc, je suis là.
    - Je vais voir ailleurs.
Si j’y suis.
Si tu y es.
    - Ne me laisse pas sans nouvelles trop longtemps.
    - Oui, je sais : il faut qu’on parle !

Et clac, une porte qui claque, ça fait tragédie ça, non ? Parce qu’on est bien en pleine tragédie là, les deux pieds dedans même ! La nymphette, dans les étoiles, à l’hôpital et ma gazelle qui fait copain-copine avec les psys. Maudites bonnes femmes !

Faut toujours que ça pense, parle ou dissèque. Ah ! Elle l’avait pas anticipé ce truc là ! Une nuit à la belle étoile. Pour nous dire merde, oui, c’est sûr. Les autres, elles découchent pour un mec ; la mienne, c’est pour un arbre. Il est où ce con de Lucas ? Y’a que son petit cul qui l’intéresse ou quoi ? Et oui, il suffit d’avoir une bitte dans le caleçon pour comprendre. Arrête Marc, tu déconnes, te voilà en pleine guerre des sexes. Faut pas abuser non plus. Tiens ! La grosse rousse qui revient des courses. D’habitude, je la croise au pain. Huit heures ou midi, elle est toujours aussi bandante. Suffit. T’as pas assez de problèmes avec les femmes ? Bon, sérieux, qu’est-ce que je fous là, comme un con, à marcher seul et à casser de la meuf ? Je me défoule. Y’a pas de mal à ça... Si, c’est nul, j’suis un gros naze. Faut que j’évacue. Courir ? Oui, courir. Non, pas avec ces pompes. Je vais pas retourner à la maison me changer ? Non. Et merde, le boulot ! J’ai appelé ou pas ? Non, j’appelle. 04 gnagna 00 27.
    - Bonjour Sylvie. Oui. Non, ça va pas. Moi ? Rien, non, c’est Lisa. Je...
     Je ne vais pas venir aujourd’hui. Je n’ai pas envie d’en parler...     
    ça va aller. Oui. Tout va bien, je t’assure. Il faut que je te laisse. Pour le
     boulot ? Je ne sais plus. Michel saura quoi faire.      
    Excuses-moi, je dois te laisser. OK. Oui... c’est ça, à demain.

Bon, c’est déjà ça, pas de boulot aujourd’hui. Aligner deux pensées de suite serait un bon début. Oh ! Ma Lisa, c’est toi qui pense ça ? Bien sûr ma nymphette, je vole, j’arrive. Oui, mais il faut que je redescende sur terre avant. A pied, oui à pied, ça doit être faisable et cela me laissera le temps de me retrouver. Je devrais peut-être appeler Camille ? Non ! Je n’ai pas envie de lui parler. Madame je-sais-tout. Mon cul, oui. Elle sait rien. Allez ! Marche, mon brave, va vers ta fille qui appelle.

Beurk, les hôpitaux, j’ai jamais aimé. Ça sent la peur cachée sous le détergent. C’était où déjà ? Un labyrinthe ce truc. Voyons voir... Pédiatrie, non. Ah ! Merci Lisa. Un, deux, troisième couloir droite. Petit escalier. Re couloir. Accueil. Infirmière à trois heures, sourire ou pas ? Oui, sourire de convenance, c’est déjà ça.
    - Bonjour madame, je cherche la chambre de Lisa Brenel.
    - Bonjour. Une minute s’il vous plaît.    
    La maman de Lisa vient juste de téléphoner. Nous lui avons
    précisé qu’aucune visite n’était autorisée pour la journée.
    Vous êtes ?
    - Son père. Excusez-moi, j’insiste. Je crois... je suis certain même
     qu’elle souhaite me voir.
    - J’appelle l’interne. Patientez un instant s’il vous plaît.

Pourparlers entre experts. Je m’installe sur une chaise métallique en transit dans le couloir.
Pas bouger mon bon Marc.
Hé ! C’est ma fille, elle m’attend ! Zen Marc, super zen. C’est bien bonhomme, tu fais des progrès. Pas de scandale, tout mignon, tout gentil, t’attends tranquillement que le conciliabule prenne fin, et t’arrêtes de taper du pied, ça fait stressé, pas bon ça pour ton image. Après trois-quart d’heure de marche forcée, tu dois pouvoir maîtriser cette jambe.

    - Monsieur Brenel, Lisa vous attend. Chambre 117 couloir droite.
    - Merci.
Lisa, Lisa, j’arrive. Mais pourquoi j’ai le trac ? C’est ma fille. Allez ! Un père exemplaire, droit dans mes bottes, rassurant et tout !
Toc toc...
    - Oui.
    - Oh ! Mon p’tit chat, c’est quoi cette tête ?
Bingo ! Je commence bien dans le genre rassurant.

    - Bonjour papa. Je voulais te voir.
    - Ça va aller p’tit chat. Pleure, laisse couler ta peine. Sors tous ces
     sanglots de ton cœur, cela fait du bien. Ma nymphette.
    - J’peux plus continuer papa.
    - Oui. On va changer, mon chat.
    - Non, c’est moi. C’est à moi de changer. Je ne peux plus faire
    semblant, mentir...
    - Comment cela mentir ? J’ignore quelque chose ?
    - Non. Tu sais tout, mais on fait comme si tout allait bien, alors que
     non. Je ne suis pas comme tout le monde. Je ne sais même pas ce
     que je suis, et je ne peux en parler à personne. D’ailleurs, c’est trop
     tard, je l’ai dit au psy.
    - Tu lui as dit quoi ?
    - Les mots de tête, comme disait maman, les arbres, les animaux et
     tout.
    - Et... il en pense quoi ?
    - Que je dois mieux me connaître, pour mieux le vivre, qu’on ne peux
     grandir sans les autres et qu’il faut s’accepter pour être acceptée.
    - Oui, bien sûr... il t’a cru ?
    - Je ne sais pas, et je ne sais pas non plus ce que je veux, seulement
     ce que je ne veux plus.
    - OK Lisa, tu es grande maintenant. Mais prends le temps de réfléchir.
     Nous devrions en parler avec maman aussi.
    - Oui. Le psy veut vous voir. D’abord vous deux, et après, on parlera.
     Pour l’instant, j’ai besoin de faire un break sans vous.
    - Oui, je comprends.
    - Tu sauras expliquer à maman que j’ai besoin d’être seule ? C’est pas
     contre vous, c’est pour moi.
    - J’essaierai petit chat.
    - Les médecins vous diront quand je serai prête. Serre-moi fort.
Je n’ai pas pris Lisa dans mes bras depuis longtemps. C’est bon de la sentir, comme avant.
    - A bientôt.
    - Faut que je parte ?
    - Oui, je préfère.
    - Bon. Tu as besoin de quelque chose ?
    - Je ne sais pas, les médecins vous diront. Au revoir papa.
    - A bientôt Lisa, repose-toi bien.

Les médecins, les médecins, ils vont pas décider de tout les médecins.
Pfft, que vais-je dire à Camille ? J’aurai dû l’appeler avant. Elle va me maudire. Bon, ce n’est pas grave, trois-quart d’heure retour pour faire le point et trouver une idée.

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